Encore une semaine d’anthologie grâce à Donald et à Jong-un, a.k.a. Rocket Man.
Les énervés de Mar-a-Lago et de Pyongyang devraient faire preuve de retenue, car ils pourraient bien sortir Godzilla de son sommeil. Et Godzilla peut être très, très méchant.
J’espérais qu’on se contenterait du « seul » risque d’une apocalypse nucléaire dans le Pacifique, mais Donald a magistralement conclu la semaine en s’attaquant aux footballeurs de son pays qui s’agenouillent lors de l’hymne national au lieu de rester debout, les traitant tout simplement … d’enfoirés (« sons of bitches »).
Dans un registre proche, et chez nous cette fois, on apprend que la rue a abattu les rois, les nazis, le plan Juppé et le CPE. Je suppose que c’est la même rue qui mettra fin au coup d’Etat social dont nous menace un président démocratiquement élu.
Un message personnel au porte-parole de la rue : si elle (la rue) pouvait débarrasser les trottoirs parisiens des deux roues (motorisés ou pas) qui y circulent au mépris de toutes les règles, je lui en serais très reconnaissant.
Je dois me faire vieux, tout cela me turlupine. Heureusement qu’entre menaces d’anéantissement, insultes et déclarations à l’emporte-pièce, mon jardin m’a encore donné de belles joies ce week-end.
Quant au chat de ma fille, il est enfin débarrassé de sa collerette.
Bienvenue à toutes et à tous dans ma semaine Twitter 38 de 2017. Joyeuse apocalypse.
Petites Capitalisations, de quoi êtes-vous le nom ?
Parmi les facteurs les plus populaires et les plus anciens figure celui de la (petite) taille : la recherche (celle de Fama et French notamment) a en effet montré il y a des années que les petites valeurs délivraient une performance ajustée du risque supérieure à celle des grandes valeurs.
MSCI, l’un des grands fournisseurs d’indices actions, s’est récemment penché sur ce qui distingue les petites valeurs des moyennes et des grandes, au-delà de la seule différence de … taille.
A part la taille, en quoi les #mallcaps sont-elles différentes ? https://t.co/TcmPFtQBP1 via @MSCI_Inc pic.twitter.com/zM1ZS3CUT5
— AlphaBetaBlog (@AlphaBetaBlogFR) September 19, 2017
Raina Oberoi, l’auteure du post, rappelle tout d’abord que combiner un indice petites capitalisations avec un indice grandes + moyennes capitalisations diminue la corrélation (graphique dans le tweet ci-dessus), donc améliore la diversification et diminue la volatilité.
Pourquoi ?
Tout d’abord parce que la répartition sectorielle des valeurs présentes dans les indices petites capitalisations est différente de celle des moyennes et grandes valeurs, avec une sous-représentation des secteurs de l’énergie, des télécommunications et des biens de consommation de base, et une sur-représentation des secteurs cycliques. Oberoi note cependant des différences importantes selon la zone géographique analysée.
Ensuite parce que les expositions aux facteurs sont également très différentes. L’analyse montre ainsi que les petites capitalisations ont un biais value, ainsi qu’une variabilité des résultats supérieure à celle des grandes et moyennes capitailsations, ce qui suggère une exposition moindre au facteur qualité. En outre, dans la mesure où elles versent moins de dividendes (en proportion), elles ont une exposition moindre au facteur rendement du dividende.
Enfin les petites valeurs réalisent une part moins élevée de leur chiffre d’affaires hors de leur marché domestique, ce qui les rend moins sensibles aux facteurs macro-économiques.
Aux USA, les millennials adoooorent les ETF
Charles Schwab est un très grand courtier en ligne, ainsi qu’un émetteur d’ETF. Schwab réalise une enquête annuelle auprès des investisseurs privés pour mesurer leur vision des fonds indiciels cotés, dont les résultats de la septième édition viennent de paraître. Cette enquête a été réalisée en ligne auprès de 1200 investisseurs privés âgés de 25 à 75 ans, disposant d’au moins 25 000 $ d’actifs à investir et ayant acheté des ETF lors des deux dernières années.
Tous les clignotants sont au vert pour les ETF, dans toutes les tranches d’âge. Mais les Millennials (ou, en meilleur français, la génération Y, celle née entre 1980 et 2000) sont particulièrement amateurs de ces produits.
Par exemple, 62% d’entre eux envisagent de ne détenir que des ETF plutôt que des titres en direct. Leur aînés restent beaucoup plus attachés aux titres en direct, surtout les baby boomers et les seniors (« matures » ci-dessous).
Etude Schwab #ETF : dites papa et maman, c'est quoi une action ? pic.twitter.com/iPynQriw4g
— AlphaBetaBlog (@AlphaBetaBlogFR) September 20, 2017
Il est à craindre pour les acteurs de la gestion active que les millennials ne changent pas leurs habitudes en vieillissant. Leur capacité d’investissement ne va faire que croître alors qu’ils finiront inéluctablement par rejoindre les rangs des seniors.
Un problème supplémentaire à gérer pour la gestion active, en plus de celui de sa performance collective très médiocre depuis 20 ans : redevenir sexy.
Quand je vois comment les sociétés de gestion communiquent aujourd’hui, je suis sceptique sur leur capacité à y arriver.
De l’importance de la valorisation des facteurs
Research Affiliates (RA) est un des acteurs historiques du smart beta. Dans un post remarquable, Rob Arnott (un des co-fondateurs de RA), Vitali Kalesnik et Lillian Wu rappellent qu’il n’y a rien de pire que de sélectionner un fonds sur la foi de sa performance à trois ans (en l’achetant quand celle-ci est bonne et en le vendant quand elle est mauvaise), ce qui est l’approche communément utilisée par les sélectionneurs de fonds et autres investisseurs institutionnels.
Ils en suggèrent une autre, qui consiste à mesurer la valorisation relative des facteurs auxquels un fonds est exposé, ce qui permettrait de prédire tant la performance future des facteurs que l’alpha futur du fonds.
La valorisation des facteurs permet de prévoir leur performance future mais aussi l'alpha des fonds https://t.co/vuS6HDmIX3 par @RA_Insights
— AlphaBetaBlog (@AlphaBetaBlogFR) September 19, 2017
Les auteurs montrent que les valorisations des portefeuilles des fonds sont la raison principale du retour à la moyenne. Par retour à la moyenne (« mean reversion ») on entend la tendance qu’a un fonds qui a été surperformant dans le passé à être sous-performant, et vice versa. S’il y a retour à la moyenne, alors il est contre-productif d’acheter la performance passée.
Le papier de RA postule que les gérants sous-performants ont des expositions importantes à des facteurs peu chers, ce qui les amènera à surperformer quand la valorisation de ces facteurs augmentera. A l’inverse, les gérants surperformants détiennent des actifs ayant des valorisations plus élevées, ce qui les amènera à sous-performer quand la valorisation de ces facteurs dimunuera.
Les auteurs montrent que pour identifier les fonds susceptibles de surperformer dans le futur, il est nécessaire de connaître l’espérance de rendement futur des différents facteurs et l’exposition des fonds à ces facteurs.
C’est long, parfois ardu et assez séduisant.
Derniers méfaits de la gestion indicielle
John Rekenthaler est un des sages de Morningstar aux Etats-Unis et une des plumes que je préfère. Il s’est récemment penché sur la dernière salve de critiques portées à la gestion indicielle, s’appuyant sur un papier de recherche de Miguel Antón, Florian Ederer, Mireia Giné et Martin Schmalz, 4 professeurs d’université, intitulé « Common Ownership, Competition, and Top Management Incentives » (« Actionnariat commun, concurrence et rémunération des dirigeants »).
Rekenthaler rappelle que les gérants actifs ont un intérêt financier majeur à critiquer la gestion indicielle : elle les prive de 40 milliards de $ de chiffre d’affaires annuel (soit 0,8% de frais de gestion – les frais moyens de la gestion active – appliqués à 5000 milliards de $ d’encours en gestion indicielle). Pour une telle somme, on se bagarre.
Il va même plus loin :
Je n’ai jamais entendu un gérant actif avancer un argument sérieux contre la gestion indicielle.
John Rekenthaler se penche sur la dernière salve de critiques contre la gestion indicielle https://t.co/nRNgCCzjTB
— AlphaBetaBlog (@AlphaBetaBlogFR) September 20, 2017
Le raisonnement des détracteurs de la gestion passive s’appuyant sur le papier des 4 professeurs est le suivant :
- Dans la mesure où la gestion indicielle doit détenir tous les titres appartenant à un indice, elle ne se préoccupe pas du succès d’une société en particulier.
- En revanche, elle a intérêt à minimiser la concurrence entre sociétés d’un même secteur en encourageant la collusion au détriment des consommateurs.
- La gestion indicielle ne se préoccupe pas de la rémunération des dirigeants.
Rekenthaler répond à chacun des points comme suit :
- Il est d’accord avec le diagnostic, les gérants indiciels sont sans doute satisfaits quand tous les bateaux sont à flot. Mais c’est aussi le cas des gérants actifs de fonds grandes capitalisations, qui détiennent des dizaines, voire parfois des des centaines de valeurs.
- Il ne comprend pas ce point. En tant qu’actionnaire, il attend des managements des entreprises cotées qu’ils maximisent les profits. La collusion avec les concurrents peut être une des méthodes employées, il n’a pas à le savoir et peu lui importe (je suppose qu’il exagère quand il écrit ceci). D’après lui, les gérants actifs comme les gérants passifs doivent avoir le même type d’approche. Il ne comprend pas l’argumentation des 4 professeurs qui considèrent qu’il est acquis que les gérants actifs souhaitent que les sociétés dont ils sont actionnaires se livrent à une concurrence féroce, au détriment de la profitabilité globale de leur secteur.
- Les professeurs citent une étude selon laquelle BlackRock, Vanguard et Fidelity ont voté en faveur de 96% des résolutions au sujet de la rémunération des dirigeants présentées par les conseils d’administration. Rekenthaler en convient : les gérants indiciels ne s’opposent quasiment jamais aux propositions de rémunération (si ce n’est que Fidelity est avant tout un gérant actif, et que BlackRock et Vanguard sont à la fois des gérants actifs et des gérants passifs, et qu’il aurait été bien plus probant de s’intéresser aux votes des seuls fonds indiciels). Mais d’après Rekenthaler (qui ne cite pas la source), les « autres » actionnaires, représentant 75% des actifs, ont voté en faveur de ces mêmes résolutions dans 88% des cas. Arithmétiquement, il ne voit pas comment les actionnaires indiciels ont pu favoriser la politique de rémunération des sociétés cotées alors qu’ils ne pèsent que 25% des encours et que le taux d’approbation des autres actionnaires, très majoritaires, est presque aussi élevé.
Gestion : que de changements en 25 ans !
Encore Morningstar, cette fois-ci pour le 25ème anniversaire de FundInvestor, une des publications phares de la société aux Etats-Unis. Les éditeurs de FundInvestor ont été interrogés sur ce qui a changé pour la gestion d’actifs en 25 ans.
Que la gestion d'actifs a changé en 25 ans ! https://t.co/wLu60udEto par les éditeurs de Morningstar FundInvestor
— AlphaBetaBlog (@AlphaBetaBlogFR) September 25, 2017
Pour Don Philips, le principal changement, c’est qu’il y a 25 ans les fonds étaient vendus, alors qu’aujourd’hui ils sont achetés. Avant, la puissance commerciale du réseau primait sur la qualité des produits. Philips établit une analogie entre la gestion d’actifs et le vin en Californie : il y a 30 ans, les vins étaient très médiocres. Aujourd’hui, il est difficile de trouver un mauvais vin tant la qualité moyenne a progressé.
Pour Russ Kinnel, l’industrie est plus transparente, notamment en matière de frais. Les plus mauvais acteurs ont disparu et la collecte et les actifs se concentrent sur les meilleurs, qu’ils soient actifs ou indiciels. Les frais ont beaucoup baissé avec la montée en puissance de la gestion indicielle et les gérants actifs sont en train de réaliser que pour être compétitifs face à des fonds indiciels facturant 0,1% de frais de gestion ou moins, il est préférable de facturer des frais de 0,7 ou 0,8% plutôt que de 1,2%.
Christine Benz déplore que l’industrie de la gestion d’actifs continue de lancer des produits pour profiter des tendances à la mode. En revanche, elle estime que les investisseurs ont appris des deux krachs des 25 dernières années (la bulle internet et la grande crise financière de 2008) et achètent moins aveuglément la performance passée.
Tant Christine Benz que Susan Dziubinski se rappellent l’importance des gérants stars il y a 25 ans : c’est moins le cas aujourd’hui avec la montée en puissance de la gestion indicielle.
Signe des temps, il y a 25 ans, le plus gros fonds au monde était un fonds actif, Fidelity Magellan. Aujourd’hui, c’est un fonds passif, Vanguard Total Stock Market.
Eloge de la paresse
Bruits de bottes (ou de missiles) dans la péninsule coréenne, comment protéger votre portefeuille ? La rue s’oppose au coup d’Etat social en France, comment protéger votre portefeuille ? Brexit, comment protéger votre portefeuille ?
Pour Dan Solin, les investisseurs cèdent trop souvent aux sirènes de l’excitation, encouragés en cela par des médias qui doivent sans arrêt attirer l’attention. Solin cite le caricatural Jim Cramer, un ancien gérant de hedge fund reconverti dans l’animation (je préfère ne pas parler de journalisme). Cramer présente l’émission Mad Money sur CNBC où il vocifère en permanence.
Il est inutile de "faire quelque chose" à votre portefeuille à chaque soubresaut de l'actualité https://t.co/w8JEZDqGZ9 par @DanSolin
— AlphaBetaBlog (@AlphaBetaBlogFR) September 23, 2017
Pour Cramer et ses semblables, chaque événement est prétexte à « faire quelque chose » à son portefeuille : tout vendre et se mettre à l’abri en achetant les obligations des Etats les plus solides quand l’apocalypse menace, ou acheter des valeurs susceptibles de profiter de l’événement.
Solin rappelle tout d’abord que les fonds d’allocation tactique, dont le mandat est précisément d’avoir une grande flexibilité pour ajuster leur allocation d’actifs en fonction des événements, ont des résultats très médiocres quand on les compare à ceux d’une allocation composée de 50% d’actions et de 50% d’obligations.
Solin mentionne enfin les acquis de la recherche universitaire (Fama et French notamment) en matière de compréhension des déterminants de la performance des actifs financiers. La Corée du Nord ne joue aucun rôle. Le Brexit non plus. Mélenchon non plus.
Conclusion de Solin :
Quand vous investissez, vous avez le choix. Vous pouvez suivre les joueurs de flûte des médias financiers qui ont peu de qualifications et ne s’appuient pas sur des données (ou bien peu) pour étayer leurs affirmations, ou lire la littérature scientifique en matière d’investissement.
L’excitation de “faire quelque chose” décroît rapidement quand votre performance continue d’être inférieure à celle de fonds indiciels à bas coûts.
Solin est l’auteur de plusieurs livres (dont The Smartest Investment Book You’ll Ever Read). Il est également coach auprès de sociétés de conseil en investissements.
Pour la bonne bouche, voici ce que disait Cramer quelques jours avant la déconfiture de Bear Stearns en mars 2008.
Quand plus, c’est moins
Larry Swedroe est le directeur de la recherche de The BAM Alliance, un réseau de conseillers financiers aux Etats-Unis. Cet ardent partisan de la gestion indicielle à bas coûts a récemment publié un post sur deux papiers de recherche examinant ce qui se passe quand le périmètre d’un gérant s’élargit.
Quand un gérant surperformant prend plus de responsabilités, sa performance se dégrade https://t.co/m6o8E6neJy par @larryswedroe
— AlphaBetaBlog (@AlphaBetaBlogFR) September 22, 2017
La première étude analysée, qui concerne 10000 fonds gérés activement aux Etats-Unis, montre tout d’abord que le périmètre des gérants s’élargit après une période de surperformance. Cet élargissement de périmètre se traduit généralement par une augmentation des encours supervisés par le gérant (promotion). A l’inverse, les gérants sous-performants voient leur périmètre se réduire (punition).
Les auteurs montrent qu’après des modifications de périmètre, la performance relative des gérants promus se dégrade alors que celle des gérants punis s’améliore.
Une autre étude, toujours sur les fonds gérés activement aux Etats-Unis, montre que plus un gérant gère de fonds, moins sa performance est bonne. Cette dégradation est plus importante quand les fonds appartiennent à des classes d’actifs différentes.
Conclusion de Swedroe :
Ceci suggère que les investisseurs qui continuent de sélectionner des fonds gérés activement doivent tenir compte des changements dans les actifs supervisés par un gérant, ainsi que du nombre de fonds supervisés.
Ces informations sont presque inaccessibles au commun des mortels.
Je serai au salon Patrimonia, le rendez-vous annuel des professionnels du patrimoine qui se tient à Lyon les 28 et 29 septembre prochains. J’animerai un atelier le jeudi 28 septembre à 17 heures 30, sur un sujet abondamment couvert dans ce blog : « Gestion active, gestion passive, comment les concilier ? »
Le plateau sera composé de Pierre Hervé, Directeur de la Gestion de Convictions Asset Management, d’Ariane Hober, Directrice Commerciale de Franklin Templeton France et de Justin Ichart, Gérant de Portefeuille chez Portzamparc Gestion.
La semaine dernière, j’ai écrit tout le bien que je pensais du dernier livre d’Edouard Petit, Créer et Piloter un Portefeuille d’ETF, et j’ai mis en ligne la préface que j’ai eu le plaisir de rédiger pour ce remarquable ouvrage. Pour l’acheter, cliquez ici pour la version papier, ou là pour la version Kindle.
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Ainsi se termine ma semaine Twitter 38 de 2017. A la semaine prochaine.