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Ma Semaine Twitter 8 de 2023

Il est des grandes causes nationales qui suscitent de rares élans d’unanimité, ce que on appelé pendant la première guerre mondiale l’Union sacrée.

La défense des rétrocessions fait partie de ces grandes causes pour le complexe militaro-industriel de la gestion et de la distribution de produits financiers en France.

Le directeur du Trésor, Emmanuel Moulin, s’est prononcé au nom de la France contre cette interdiction, qui mettrait en péril l’accès au conseil financier.

La présidente de l’AMF, Marie-Anne Barbat-Layani, s’est prononcée contre cette interdiction, qui mettrait en péril l’accès au conseil financier (voir ci-dessous).

Valérie Baudson, la directrice générale d’Amundi, premier gérant d’actifs français et européen, s’est prononcée contre cette interdiction, qui mettrait en péril l’accès au conseil financier.

Je me suis demandé si le journaliste n’avait pas sorti les propos de leur contexte. Theo Andrew m’a communiqué la citation complète :

I think it [l’interdiction des rétrocessions] is not good for the final retail clients, because in that case, the clients do not get any advice any more. That’s what we saw in the UK and the Netherlands.

Cette union sacrée pour le maintien du statu quo, à savoir des frais de gestion beaucoup trop élevés pour la gestion active et une absence totale de concurrence, est absolument stupéfiante, d’autant plus qu’elle s’appuie sur un mythe, celui de l’advice gap, qu’aucune étude sérieuse n’étaie1.

Comme tous les mythes, il est répété en boucle et jamais questionné. Comme je l’écrivais la semaine dernière, « il faut que rien ne change pour que rien ne change ».

Cette Union sacrée sans les épargnants, au nom des épargnants et contre les épargnants est un chef d’oeuvre de désinformation.

Pendant les confinements, j’avais fait de beaux voyages dans toute l’Europe sans quitter ma chambre ni mon balcon, grâce notamment à Paolo Rumiz (j’en avais parlé ici et ). 

Rumiz est un journaliste italien né en 1947 à Trieste. C’est aussi un grand voyageur (il se définit comme « un voyageur qui aime écrire »). Et il parle parfaitement français.

Caroline Broué l’a interrogé dans A voix nue sur France Culture. C’est intitulé « Paolo Rumiz, l’homme qui écrit avec ses pieds » et les 5 épisodes de 30 minutes sont magnifiques.

Si vous ne devez écouter qu’un épisode, je recommande le dernier, Un chant pour l’Europe, qui m’a donné très envie de lire le dernier livre de Rumiz traduit en français, Le fil sans fin.

De Rumiz, vous pouvez lire Aux frontières de l’Europe, Le phare, voyage immobile, La légendes des montagnes qui naviguent, Appia ou L’ombre d’Hannibal.

J’ai lu la semaine dernière le très beau livre d’Annette Wieviorka, historienne de la Shoah, Tombeaux – Autobiographie de ma famille.

Alors que disparaissent les derniers représentants de sa famille appartenant à la génération de ses parents, l’historienne née en 1948 part à la recherche des traces laissées par les disparus.

Il y a d’un côté ceux qui ont fui pendant la seconde guerre mondiale, et ont survécu, et sont qui sont restés, et qui, déportés, ont été assassinés.

Les chapitres égrènent les étapes familières du périple des familles juives de cette époque : Paris, Nice, la Suisse, Auschwitz.

Aby et Méni avaient été baigné dans cette culture qu’ils connaissaient si bien. Elle prit fin avec eux. Dans ma famille, comme dans celle de mes cousins, même si nous étions de toute évidence juifs, rien ne nous fut transmis. Nous n’avons célébré aucune des fêtes juives dont nous ignorions tout. Nous n’avons jamais mis les pieds dans une synagogue, ou exceptionnellement. Nous avons été dotés de prénoms français. Sans que ce fût un projet consciemment exprimé, tout dans notre éducation a contribué à faire de nous de bons Français, bien intégrés dans la société. J’ai pensé, longtemps avec une nostalgie douloureuse, à ce qu’il en aurait été si mes grands-parents paternels avaient vécu. Nous aurions pris part au seder qu’ils auraient organisé chez eux, jeûné à Kippour, allumé les bougies de Hanoukka. Bref, nous aurions peut-être été des maillons de cette chaîne d’or.

Des nouvelles de mon jardin ! Le printemps approchant, nous sommes allés faire un saut dans le Vexin pour tailler la haie et les rosiers.

Le printemps approche, je ne vais pas tarder à commencer à faire les semis.

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Bienvenue dans ma semaine Twitter 8 de 2023.

Déserts médicaux financiers

Anne-Marie Barbat-Layani (AMBL) a été nommée par le Président de la République à la tête de l’AMF en septembre 2022. Elle a succédé à Robert Ophèle et fera, comme ses prédécesseurs, un mandat de 5 ans non renouvelable.

Sa nomination avait donné lieu à quelques commentaires critiques, du fait de ses passages dans le privé, à la direction générale adjointe de la Fédération nationale du Crédit Agricole en 2007-2010 et à la direction générale de la Fédération bancaire française et de l’Association française des banques de 2014 à 2019.

Je n’étais pas d’accord avec ces critiques et j’avais écrit ceci :

[J]e vois dans le parcours professionnel de AMBL tous les éléments pour lui permettre d’être une bonne présidente de l’AMF. Je ne vois pas en quoi ses passages dans le privé l’empêcheraient d’exercer ses fonctions de manière indépendante.

Je vais finir par me demander si je n’ai pas été naïf. Dans ses voeux à la place financière en janvier dernier, Anne-Marie Barbat-Layani avait tout d’abord affirmé péremptoirement que « les idées simples en apparence, comme l’interdiction pure et simple des commissions, ne sont pas forcément les plus efficaces » (source).

Alors que la France, par le biais du directeur du Trésor Emmanuel Moulin, a emboîté le pas à l’Allemagne pour s’opposer à l’interdiction des rétrocessions en Europe (j’ai parlé ici de ce choix de l’immobilisme, de la rente et des frais élevés), elle a abondé dans ce sens dans un entretien à François Monnier et Rémi Le Bailly d’Investir.

L’interdiction des rétrocessions ?

[C]ela peut avoir pour conséquence de supprimer le conseil, ce qui est, bien sûr, un sérieux problème. Certaines études montrent que les gens qui ont moins de 100.000 € n’auraient, dans ce cas, plus du tout accès au conseil. Or nous estimons indispensable de conserver un accès au conseil de proximité.

Tout en s’appuyant sur le mythe créé de toutes pièces de l’advice gap, Mme Barbat-Layani agite un nouvel épouvantail, tout aussi fictif : celui des « déserts financiers ».

Eh oui, comme il y a des déserts médicaux, il y aurait des déserts financiers.

Là où l’on n’a pas trouvé le remède pour les premiers, le maintien des rétrocessions nous permettra d’éviter le drame affreux de déserts financiers en France.

Ouf, on a échappé au pire. Le pire, ce serait que « la moitié des points de conseil [aient] disparu ». Euh, vous parlez bien des des points de « vente » ?

Mme Barbat-Layani présente de surcroît le conseil indépendant au sens de MIF 2 de façon particulièrement biaisée : « payer pour le conseil avant même d’investir ».

La situation actuelle n’est certes pas parfaite, mais attention aux fausses bonnes idées. Payer pour le conseil, avant même d’investir, certains le feront mais pas tous, et il ne faut pas créer des déserts financiers. Posons-nous la question de savoir ce qu’il se passerait dans cinq ans si la moitié des points de conseil avaient disparu.

Point d’orgue de ce festival de voeux pieux et de vérités premières (italique ajouté par mes soins) :

Il faut davantage de transparence sur les coûts et s’assurer que la qualité du conseil continue de progresser et qu’une attention réelle est portée à la situation de l’épargnant. C’est un sujet très complexe. Chaque pays part d’une situation différente.

Les bras m’en tombent.

En parallèle, l’AMF poursuit ses activités — fort utiles — en matière d’éducation financière. Par exemple avec une courte vidéo sur les questions à poser à son « conseiller »2 financier.

Il en manque une à mon avis, et de taille : « Comment êtes-vous rémunéré.e ? » En jargon réglementaire : « Etes-vous indépendant (payé exclusivement par le client) ou non-indépendant (payé par le fournisseur de produits et/ou par un intermédiaire) au sens de MIF2 ? »

C’est un oubli ou c’est exprès ?

Il est absolument incompréhensible que cette information soit aussi difficile à trouver : impossible de rechercher un CIF selon ce critère sur le site de l’ORIAS ; impossible de rechercher un CIF selon ce critère sur le site des associations de CIF agréées par l’AMF.

Pourquoi tout le complexe militaro-industriel de la distribution de produits financiers, régulateur compris, cache-t-il les CIF indépendants ? Pour protéger les particuliers ?

M’écrire si vous avez une explication, je suis perplexe.

Je sais bien que les CIF indépendants ne représentent que 6% du total, mais quand même.

Bazooka Charlie

J’ai brièvement parlé ici du show de Charlie Munger, 99 ans, lors de la dernière assemblée générale des actionnaires du Daily Journal.

Quand on vieillit bien, comme Charlie, il arrive que certaines inhibitions disparaissent et que la parole sorte sans filtre.

Je vais donc consacrer à ce grand moment un peu plus de bande passante, tant la parole désinhibée de Charlie est précieuse dans un univers où tous les acteurs professionnels prétendent avoir à coeur l’intérêt des clients.

Tellement d’ailleurs qu’ils parlent au nom de leurs clients, et à la place de leurs clients (voir ci-dessus).

C’est à partir de 32:10 dans la vidéo ci-dessus.

Munger considère que nous n’avons pas tout à fait notre libre-arbitre :

Si je devais mentionner un facteur dominant dans les mauvaises décisions, ce serait ce que j’appelle le déni. Si la vérité est suffisamment déplaisante, le cerveau des gens se joue d’eux et ils considèrent que ça ne se produit pas vraiment.

Il donne un exemple de déni :

Prenez le monde de la gestion d’actifs. Combien de gérants vont-ils battre les indices ? Si l’on tient coûte de tous les coûts, je dirais peut-être 5%… Tous les autres vivent dans un état de déni extrême.

Charlie a un terme pour caractériser cet état de fait : dépravation morale.

Ils ont pour habitude de facturer des frais élevés pour des choses qui ne font aucun bien à leurs clients. Cela s’appelle de la dépravation morale.

Il donne un exemple.

Si une veuve vient vous voir avec 500,000 $ et que vous lui facturez 1% par an, vous pourriez lui recommander un fonds indiciel, mais vous avez besoin de ce 1%. C’est ainsi que les gens facturent des frais considérables pour un conseil sans valeur.

Ce n’est pas un comportement isolé.

La profession toute entière est dans le déni. Il est partout. Je cite toujours Démosthène. Il y a plus de 2000 ans, il a dit que les gens croient ce qu’ils veulent croire.

Sur Charlie Munger, on pourra lire en français Charlie Munger – L’investisseur avisé de Tren Griffin. Si vous préférez le lire en anglais : Charlie Munger – The Complete Investor.

En anglais, on pourra lire Charlie Munger – The Pursuit of Worldly Wisdom de Rui Zhi Dong.

Si vous voulez briller dans les cocktails en citant Démosthène, Claude Carlier lui a consacré une biographie : Démosthène.

Célébrités frelatées

En France, Nabilla Benattia-Vergara avait parlé du bitcoin sur son compte Snapchat en janvier 2018.

C’est un peu la nouvelle monnaie genre la monnaie du futur et donc en fait je trouve que c’est assez bien.

Elle était en réalité en service commandé pour promouvoir contre rémunération le site TraderLeBitcoin, qui fournit des services de formation, et d’inénarrables « plans » (à savoir les points d’entrée et de sortie de ses propres trades sur le bitcoin).

La justice avait suivi son cours (lent mais inexorable) et Nabilla Benattia-Vergara avait dû payer en juillet 2021 une amende de 20000 euros pour pratiques commerciales trompeuses (source) suite à l’enquête menée par la DGCCRF3.

Aux Etats-Unis, les acteurs de l’univers parallèle des crypto ont eu beaucoup d’argent et ont pu payer de nombreuses célébrités pour promouvoir leurs services.

La SEC poursuit régulièrement les célébrités qui omettent de mentionner le fait qu’elles ont été rémunérées. Et comme ces célébrités ne peuvent pas se permettre d’être condamnées, car c’est mauvais pour leur image, elles font généralement des transactions avec la SEC, sans reconnaissance de culpabilité, puisque c’est ainsi que cela marche.

Le texte de la dernière transaction en date, avec l’ex-basketteur Paul Pierce, est fort réjouissant à lire. Les communiquants osent tout (c’est même à cela qu’on les reconnaît) et les célébrités sont parfois d’une stupidité confondante.

Entre le 26 mai et le 5 juin 2021, notre ex-basketteur a fait la promotion d’un jeton sur Twitter : Emax Tokens, vendus par EthereumMax sur sa plateforme de trading.

Pierce a écrit des choses matériellement inexactes et susceptibles d’induire en erreur son audience (plus de 4 millions d’abonnés au moment des faits).

Il a en outre omis d’informer cette audience du fait qu’il avait été rémunéré pour promouvoir ce jeton. Il avait en effet reçu des jetons gratuits, pour une valeur au moment où il les a reçus de 244 116 dollars.

Pierce avait été commentateur pour la chaîne sportive ESPN, qui avait mis fin à son contrat en avril 2021.

Dans un tweet daté du 26 mai 2021, Pierce commence à promouvoir Emax en disant à ESPN qu’il n’avait pas besoin d’eux. Parce qu’il a gagné plus d’argent avec Emax en un mois qu’il n’en gagnait chez ESPN en un an. 

Son tweet pointe vers le site Ethereum Max. Notez la promesse de ce site : Disrupt History. Eh oui, il y a l’innovation disruptive de Cathie Wood et la disruption de l’histoire avec Emax.

La SEC a fait les comptes : la rémunération brute versée par ESPN à Pierce l’année précédente était supérieure à 1 million de dollars. La valeur des jetons perçus par Peirce au 26 mai 2021 était de 46000 dollars. C’est moins, Paul, pas plus.

Mensonge.

Le 28 mai 2021, Paul publie un tweet avec ce que l’on imagine être un extrait de son compte de trading chez EthereumMax.

Il y en avait pour 2,5 millions de dollars, une hausse de 83% par rapport à son cours d’achat.

Pourquoi pas vous, mes chers fans ?

La SEC confirme que cette copie d’extrait de compte d’un tiers a été fournie à Pierce pour qu’il la publie sur son compte Twitter.

Mensonge.

Le 30 mai 2021, Pierce répond à une question des « gens » qui demandent s’ils doivent prendre le train de l’Emax en marche.

Ben oui les gens, moi j’y suis pour le long terme, si vous avez manqué la première vague, c’est le moment de monter à bord.

A quoi il ajoute #fuckespn parce que le clash, c’est cool.

« I’m n for the long haul », qu’il écrit, alors qu’il avait commencé à vendre ses Emax dès le 26 mai et qu’il a continué après le tweet ci-dessus.

Mensonge.

Le 6 juin 2021, Pierce dit qu’il va de nouveau acheter des Emax.

Alors qu’il continuait de vendre les Emax reçus en rémunération de ses mensonges.

Pierce va donc devoir rembourser 244 116 dollars de gains mal acquis majorés de 15 449 dollars d’intérêts, et s’acquitter d’une amende de 1,15 million de dollars.

Compte crypto sécurisé

J’ai régulièrement parlé sur ce blog du fameux livret Coinhouse, torpillé par FTX, de son hilarant vrai-faux indicateur synthétique de risque et de rendement, et surtout de son process de gestion.

On aurait pu penser que les multiples faillites (Celsius, 3AC, Genesis Global Capital, Voyager Digital, FTX) auraient tempéré les enthousiasmes vis-à-vis des crypto, mais non. 

Un entrepreneur expérimenté ambitionne de lancer une offre à destination des CGP et a créé une société pour cela, Stelaris, avec deux associés, Chloé Desenfans et Nicolas Marcheresse.

Il s’appelle Bruno Delpeut4 et il a donné avec ses deux associés un entretien à Citywire France dans lequel certains des propos tenus m’ont fort surpris.

L’exposé des motifs est sans surprise. J’ai ajouté des italiques aux propos qui me semblent les plus contestables. La dernière phrase me semble particulièrement terrifiante.

Il n’existe aujourd’hui aucune classe d’actifs permettant de générer autant de valeur que la crypto, bien que cela implique également un risque de perte. Les CGP se doivent de proposer une offre dans l’ère [sic] du temps à leurs clients, qui intègre toutes les dimensions susceptibles de créer de la valeur patrimoniale. Le CGP est un architecte qui doit proposer une offre globale : s’il n’inclut pas la crypto, il ne remplit pas cette mission.

Delpeut décrit une des cinq offres à venir de la société : un compte crypto sécurisé. Compte, hein, pas livret, faudrait quand même pas confondre avec le livret Coinhouse. Crypto, parce qu’exposé à des crypto. Et sécurisé, parce que. Euh ?

La première est un compte crypto sécurisé, même si le risque existe toujours quand on parle de cryptomonnaies, avec une allocation basée uniquement sur des stablecoins.

C’est donc un compte sécurisé, mais le risque existant toujours quand on parle de cryptomonnaies, ce n’est pas vraiment un compte sécurisé. Si ?

Allô l’AMF, vous avez semble-t-il laissé passer le vrai-faux indicateur SRR, allez-vous laisser passer « sécurisé » alors que le terme semble à la fois totalement impropre et trompeur ?

Bon, et ça marche comment ce compte sécurisé ? Et ça rapporte combien ?

Le compte comporte trois stablecoins : deux en dollar, l’USDT et l’USDC [les deux plus grosses capitalisations du genre, NDLR] et un en euro, l’EUROC. Nous visons un rendement compris entre 5% et 12% nets.

Mâtin, entre 5% et 12% nets ? Après rémunération du CGP ou avant ?

Je rappelle que feu le livret Coinhouse rapportait environ 5% par an (mais sur 13 semaines seulement, après c’était révisable, et sans garantie du capital), avant l’implosion FTX.

Les deux associés de Delpeut dans Stelaris sont les co-fondateurs de Feel Mining, un des PSAN enregistrés auprès de l’AMF (comme Coinhouse).

Feel Mining propose du « fait-maison » selon Chloé Desenfans (italique ajouté par mes soins pour mettre en valeur les propos que je ne suis pas très sûr de comprendre). 

Toute notre offre est maîtrisée en interne, nous ne nous reposons sur aucun autre acteur. Cela signifie que des épisodes comme FTX n’ont pas d’impact sur nous, en dehors de la baisse des cours. De plus, nos équipes ont des process très stricts. Par exemple, les fonds doivent être déposés sur un nombre minimum de plateformes de finance décentralisée. Pour rappel, ces plateformes sont totalement décentralisées. On ne se repose donc pas sur un acteur lorsque l’on dépose des cryptomonnaies dessus.

Donc, pas d’impact, en dehors de la baisse des cours. Donc, il y a bien un impact, non ? Et laisser entendre qu’une plateforme totalement décentralisée est complètement sûre, n’est-ce pas une légère exagération ?

Heureusement que les équipes ont « des process très stricts », ça me rassure.

Ou pas.

Comme le taux de 12% mentionné par Bruno Delpeut comme borne haute des comptes crypto sécurisés me laisse totalement perplexe, je suis allé faire un tour sur le site de Feel Mining, à la page présentant les offres de staking en stablecoins.

J’y ai vu des protocoles proposant des rendements annuels allant de 3 à 6%. Je suppose que les rendements de 12% sont réservés aux clients privilégiés, aux anciens basketteurs de haut niveau ou aux clients de Stelaris.

Ah, et cet avertissement sur ces rendements (« APR » en bon français, à savoir « Annual Percentage Rate ») :

Le rendement APR correspond au taux d’intérêt annuel calculé en fonction du nombre de jetons “stakés”. Le APR est une donnée qui varie en fonction de l’état du réseau, sa stabilité ne peut être garantie par FEEL MINING.

Coinhouse pouvait proposer des rendements très supérieurs au taux sans risque grâce à son maintenant célèbre process de gestion (« Nous identifions les bons supports d’investissement »).

La version Feel Mining de ce process, c’est ceci (toujours sur la même page) :

La répartition des stablecoins varie dynamiquement en fonction des configurations des marchés.

J’attends avec impatience les documents contractuels des comptes crypto sécurisés de Stelaris.

Un bon point pour Feel Mining par rapport à Coinhouse, la société (Blockchain Security Process) dépose ses comptes

Des nouvelles du #H2Ogate

Avertissement : l’Association Collectif Porteurs H2O m’a proposé de l’assister dans le cadre d’une mission rémunérée (détails ici). A vous de déterminer si cette mission influe sur ma couverture de l’affaire H2O AM sur ce blog.

Sacré Lars : pendant que H2O AM, Bruno Crastes et Vincent Chailley doivent respectivement régler 75 millions d’euros,  15 millions d’euros et 3 millions d’euros au trésor public, il parade sur Twitter en se faisant photographier avec une célébrité.

Le voici avec son « ami » Klitschko, ex-boxeur Ukrainien. La photo a été prise lors de la dernière conférence de Münich sur la sécurité, dont Tennor était apparemment partenaire.

J’espère que les organisateurs, qui doivent connaître les pratiques de Lars, ont demandé un paiement d’avance.

Pendant que Lars fait le beau avec Klitschko à Münich, l’oracle de Monaco (on ne rit pas) partage son pronostic sur les prochains remboursements de Tennor sa vision des marchés.

Je ne fréquente généralement pas le forum de Boursorama, mais la curiosité m’a poussé à regarder ce qui se disait sur l’affaire H2O AM.

Il semble que les courtiers et assureurs interrogés par les détenteurs de side-pockets aient la même approche que H2O AM en matière de communication : circulez, y’a rien à voir. C’est assez affligeant.

Depuis le coup de grisou lié à la brutale chute du rouble russe, les fonds affectés ont remonté une partie de la pente.

Mais pas tous : Multiequities est encore dans le rouge (dans le tableau ci-dessous, quand la hausse nécessaire pour effacer la baisse est négative, c’est que la valeur liquidative du fonds est repassée au-dessus du niveau qu’elle avait à la date de début du drawdown). 

Et si l’on regarde l’évolution depuis le plus haut atteint avant la scission des fonds en deux (la partie saine logée dans un nouveau fonds avec « FCP » à la fin du nom et la partie contaminée par le bacille illiquidita pestis windhorstis  🦠 dans le side pocket), la baisse est encore très, très loin d’avoir été effacée, comme on peut le voir plus bas.

Depuis la scission des 7 fonds sinistrés de H2O AM, il est très difficile de reconstituer la performance des « vieux » fonds d’avant la scission.

Je me livre à l’exercice en calculant une valeur liquidative reconstituée, égale à la somme de la valeur liquidative des « nouveaux » fonds liquides (FCP à la fin du nom) et de la valeur liquidative mensuelle estimative des side-pockets.

Cette valeur liquidative reconstituée est une fiction, car aucune transaction n’est possible sur les side-pockets.

Mais elle permet de voir où en sont les porteurs de parts. Notamment par rapport au plus-haut historique atteint par les « vieux » fonds avant qu’ils ne heurtent des icebergs et fassent naufrage en février et mars 2020.

Autre limite de l’exercice : rien ne dit que les porteurs de parts récupèreront l’équivalent de la dernière valeur liquidative estimative des side-pockets. On ne le saura que quand toutes les participations illiquides auront été revendues au seul acheteur, Tennor, la holding de Lars Windhorst.

Ou plus exactement au fur et à mesure du remboursement par Tennor de la « first super senior secured note » (FSSSN) émise par Tennor, portant intérêt au taux annuel de 4,5% et prévoyant la possibilité de remboursements intermédiaires. Je rappelle (j’en avais parlé ici) que le remboursement total était initialement prévu début 2022. Les créanciers de Tennor, pour éviter la mise en liquidation de la société imposée par un tribunal néerlandais, ont consenti un délai supplémentaire de 6 mois (soit un remboursement début juillet 2022).

Je rappelle aussi que, comme de bien entendu, il n'y a eu aucun remboursement entre juillet et décembre 2022 de la part de Tennor.

Début janvier 2023, H2O AM a laissé entendre dans un communiqué sybillin que Tennor avait procédé fin 2022 à un premier remboursement partiel susceptible de permettre de diminuer le nominal de la FSSSN de 250 millions d'euros.

En fait de 250 millions, ce sont 144 millions qui semblent avoir été remboursés d'après mes calculs.

Par ailleurs, un porte-parole de Tennor avait déclaré début janvier au quotidien régional allemand Westfallen-Blatt que la holding de Lars Windhorst avait procédé en 2022 à plusieurs remboursements partiels de la FSSSN, dont un fin 2022 pour solde de tout compte

Les calculs ci-dessous n'en tiennent pas compte car je n'ai pas encore décidé de la meilleure manière d'intégrer les remboursements à mes calculs.

Voilà où on en est au 23 février 2023 (date de la VL des fonds liquides dont le nom se termine par « FCP », la dernière valeur liquidative mensuelle estimative des side-pockets étant en date du 30 décembre 2022).

En matière de décollecte, voilà où on en est.

En matière de performance, voilà où on en est.

Les produits dont il a été question dans ma semaine Twitter 8 peuvent être achetés en priorité chez votre libraire (pour les livres).

Sinon, si vous n’avez vraiment pas accès à un libraire, ou pour les livres en anglais, parfois plus difficiles à se procurer en librairie en France, vous pouvez cliquer sur les liens ci-dessous (informations sur le programme d’affiliation Amazon ici).

Vous pouvez suivre le compte Twitter d’Alpha Beta Blog ici et mon compte en anglais .

N’hésitez pas à réagir dans la rubrique « Laisser un commentaire » à la fin de chaque article. Votre contribution ne sera publiée qu’après validation par mes soins.

Je ne suis pas habilité à donner des conseils sur les produits de placement : ne me sollicitez pas pour cela car je ne vous répondrai pas.

Si vous avez des questions, consultez un conseiller en investissement financier. Un conseiller en investissement financier, c’est quelqu’un que vous payez pour qu’il.elle vous donne des conseils. Dans le jargon de MIF 2, seul le conseiller exclusivement payé par ses clients peut se déclarer indépendant.

Quelqu’un qui est payé par les fournisseurs de produits pour vous vendre lesdits produits, c’est un vendeur, pas un conseiller.

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C’était ma semaine Twitter 8 de 2023. Sayōnara. さようなら.

Illustration : carte postale de 1916 en faveur de l'union sacrée. Source : La ligue de l'enseignement.

  1. Lisez ici le communiqué conjoint de Better Finance, BEUC et FinanceWatch au sujet de cet advice gap.
  2. Je mets conseiller entre guillemets car il me semble que seul un CIF indépendant au sens de MIF 2, c’est–à-dire exclusivement payé par son client, mérite cette qualification. Un CIF non indépendant, donc payé par les fournisseurs de produits, n’est pas un conseiller, c’est un vendeur.
  3. La direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes est une administration française relevant du ministère de l’Économie.
  4. Je l’ai pratiqué à titre professionnel dans une de ses aventures entrepreneuriales quand je travaillais chez Quantalys.

3 réponses sur « Ma Semaine Twitter 8 de 2023 »

Quand on veut acheter une voiture, on sait que l’on a affaire a un vendeur. Et le secteur n’essaye pas de nous faire croire qu’il s’agit d’un « conseiller en mobilite ». Le secteur financier lui n’a pas cette retenue, cette pudeur, cette honnetete.

Merci Philippe pour ce nouveau billet.
Le terme « stable coin » est trompeur, et laisse penser que le risque sur ce genre de jetons n’existe pas.
En conditions normales de marché, et hors bug (comme dans un smart contract), ni effet domino (comme FTX), un stable coin est censé maintenir du 1 pour 1 avec une monnaie FIAT, comme l’USD ou l’EUR. Note: il existe plusieurs façons d’implémenter un stable coin.
Sur des forums j’ai lu plusieurs fois des messages comme: « je laisse tomber le livret A pour des livrets crypto sur stable coin ».
Terra Luna faisait partie de ces stable coin. Le cours s’est effondré en mai 2022, à une vitesse… propre au monde des cryptos.

On en revient inlassablement au même constat: s’il y a de la performance, c’est qu’il y a du risque (au sens incertitude).
Si on ne voit pas d’où vient le risque, c’est qu’il faut chercher plus loin.
Stable coin, ou pas.

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